Traitement d’hiver

Par Janine Kievits

Varroa destructor

Varroa destructor est l’ennemi mortel de nos abeilles. Cela a été encore longuement rappelé lors du récent congrès Apimondia, où plusieurs chercheurs sont venus confirmer que ce parasite reste dans la plupart des pays une cause première de mortalité dans les ruchers. Le traitement de la varroase est indispensable si vous souhaitez vous assurer que vos colonies survivront à l’hiver ; seul un but de sélection peut justifier l’absence de traitement, qui se soldera inévitablement, il faut le savoir, par la mort d’une partie des colonies.

Les produits et époques de traitement autorisés font l’objet d’un texte légal, l’arrêté ministériel du 10 août 2007 relatif à la lutte organisée contre les maladies des abeilles.

Ce texte, qui nous dispense de déclarer la varroase puisque celle-ci est désormais présente sur tout le territoire, nous dit aussi quels sont les produits autorisés : coumaphos (Périzin), fluvalinate (Apistan), thymol (Thymovar) et acide oxalique (Oxuvar ou préparation magistrale). Seules ces deux dernières substances sont encore disponibles sur le marché. En effet la dernière agréation de l’Apistan a expiré le 13 mai 2008; quant au Perizin, il n’est actuellement plus fabriqué. En outre l’usage de ces produits n’est pas recommandé. En effet certaines souches de Varroa sont désormais résistantes au fluvalinate. Le coumaphos, quant à lui, est un insecticide organophosphoré, non dépourvu de toxicité pour les abeilles (et pour nous !) et soluble dans les corps gras : il pénètre dans les cires qu’il contamine durablement.

Le traitement d’été, fait au Thymovar, vise à supprimer au moins 60% des varroas avant le développement des larves qui donneront les abeilles d’hiver. Il s’applique donc dès le tout début d’août, les abeilles d’hiver étant pondues à partir de la première ou de la seconde semaine d’août.

Ce traitement de six semaines, qui doit être terminé à l’heure qu’il est, se fait à une époque où il y a encore du couvain dans la ruche. Il n’est donc pas toujours suffisamment efficace comme traitement unique.

Vous avez réalisé un traitement d’été ? Ce traitement est considéré comme suffisant si il tombe moins d’un varroa par jour pour l’ensemble de la colonie (le comptage est à faire plusieurs semaines de suite !). Il n’est donc pas nécessaire de traiter les ruches qui sont dans ce cas. Les colonies où la chute naturelle est plus importante subiront un traitement d’hiver.

Une seule substance convient pour cela et est actuellement autorisée chez nous : l’acide oxalique. L’acide oxalique peut être employé sous deux formes : l’Oxuvar, qui est un médicament vétérinaire importé, et la préparation magistrale à faire par le pharmacien sous prescription vétérinaire (35g d’acide oxalique dihydrate par litre de solution de sucre 1/1).

Ce traitement doit impérativement se faire à un moment où il n’y a plus de couvain dans la ruche. Pour cela, attendre trois semaines après la première époque de vraie gelée, soit ordinairement chez nous, la première quinzaine de décembre et guère plus tard ! La ponte reprend en effet souvent avec l’allongement des jours, c’est à dire qu’elle est possible dès la mi-janvier.

Ouvrir une ruche en plein hiver ! Nos grands-pères en frémiraient ! Pourtant ce geste, impensable il y a encore 20 ans, est devenu courant et peut se faire sans dommage aucun pour les abeilles, à condition de procéder comme suit :

Choisissez une belle journée c’est-à-dire :

  • une journée sans vent. Contrairement à une idée reçue la grappe ne craint guère le froid, elle est très capable de réguler sa température même par gel sévère. Par contre elle craint le vent car celui-ci dérange l’organisation de la grappe (un manteau d’abeilles isolant, un cœur de grappe où sont les abeilles chauffeuses) et cette organisation est indispensable à la régulation thermique ;
  • une journée où la température dépasse 5°C car sans cela la grappe sera trop serrée pour que toutes les abeilles soient en contact avec le traitement.

Le sirop contenant l’acide oxalique sera réchauffé à la température du corps, au bain-marie, et le pot le contenant sera placé dans un récipient plus grand, entouré d’un isolant (un essuie éponge, un morceau de polaire…). Le tout est emporté au rucher avec une seringue de 5 ml ou un doseur avec bec de versage, et un petit blochet de bois. La ruche est ouverte sans fumée ; la grappe est repérée (utiliser une lampe de poche, ou déplacer le lange du plateau pour la localiser au travers de la ruche). Chaque ruelle peuplée d’abeilles reçoit 5 ml de sirop. Le petit blochet est posé sur le cadre suivant la ruelle traitée, pour éviter de traiter deux fois la même ruelle.

Traiter une ruche à l’acide oxalique par dégouttement prend environ 3 minutes. Il m’est arrivé de trouver une vingtaines d’abeilles mortes devant la ruche le lendemain du traitement mais je n’ai jamais pu déterminer si cette petite mortalité était due au traitement ou si ces abeilles étaient mortes au sein de la grappe et tombées suite au mouvement de la grappe lorsque les abeilles se répartissent le sirop.

Attention ! Le sirop une fois fait se ne conserve pas à température ambiante : il brunit (formation d’HMF). Vous pouvez le conserver 6 semaines à température de la cave, 6 mois au plus au frigo.

Références : sur le traitement à l’acide oxalique : site de l’agroscope de Liebefeld : http://www.agroscope.admin.ch/imkerei/00316/00329/index.html?lang=fr, voir les items « Varroa-biologie » et » Lutte contre les maladies ».

L’arrêté du 10 août 2007 se trouve en PDF sur le site du Reflex du Conseil d’Etat : http://reflex.raadvst-consetat.be/reflex/pdf/Mbbs/2007/08/23/106534.pdf.

Janine Kievits