« Au rucher » 2019-09

Par Michel Smet

Si la récolte de miel de printemps fut minable, nous devons bien accepter que celle d’été a été exceptionnellement bonne, du moins si les ruches se trouvaient dans un endroit boisé. En effet, les tilleuls ont donné un nectar des plus abondants, pour le plus grand bonheur des apiculteurs que nous sommes. Et c’est très bien ainsi!

La récolte terminée, nous devons donner toute notre énergie à la lutte contre le varroa, ennemi juré des colonies d’abeilles mellifères depuis 30 ans maintenant. Disons-le tout de suite, celui qui ne traite pas finira par tout perdre, c’est certain! Alors, lutter oui, mais faut-il encore lutter correctement. Lutter correctement, c’est quoi, me direz-vous? C’est faire en sorte d’éliminer les varroas présents dans la ruche mais aussi ceux qui vont réapparaitre au cours de la fin de l’année et qui sont issus de ce qu’on appelle  la réinfestation. Nous remarquons depuis plusieurs années que les colonies bien traitées en aout par un traitement de longue haleine subissent une réinfestation en décembre. Comment est-ce possible me direz-vous puisque les varroas ont été éliminés lors du traitement? Nous devons bien admettre que certains apiculteurs (ou plutôt détenteurs de ruches) refusent ou négligent le traitement d’élimination de ce vampire qu’est le varroa en partant du principe que la nature est bien faite et que survivront les meilleures colonies. Ou alors, ils refusent à tout prix d’introduire du chimique dans leurs peuples. Je peux les comprendre, et, quelque part, ils n’ont pas tort, mais si depuis 30 ans, on s’était abstenu de lutter, il ne resterait pas grand-chose comme ruchers Wallons et nous ne mangerions plus que du miel chinois! Il faut donc raison garder et absolument diminuer le nombre des varroas à un minimum, c’est fondamental pour garder nos abeilles. Pour ce faire, tous les coups sont permis, à condition de travailler avec bon sens et réflexion. Nous ne devons surtout pas ménager nos efforts et être conscients que si nous ne traitons pas nos peuples, nous participons à la réinfestation des colonies avoisinantes quelques semaines plus tard, quand les colonies non traitées finissent pas être pillées des suites de leur disparition due à la  surcharge en varroas. Par la suite, ceux qui ont bien fait leur travail voient eux aussi leurs colonies disparaître en début de printemps sans savoir pourquoi. C’est bien là que le bât blesse, et qu’il faut tenir compte et être conscient que la réinfestation existe.

C’est dans ce sens que le traitement à l’acide oxalique de mi décembre est absolument nécessaire et ne doit en aucun cas être négligé. Au bout du compte, c’est finalement lui qui nous dira d’une manière certaine si les colonies mises en hivernage sont » clean » de varroas ou pas.  En résumé, on fera un traitement de longue durée (12 semaines) dès le retrait des hausses de miel  à l’aide d’un produit du type APIVAR disponible en pharmacie, puis, vers la mi décembre, un check-up à l’aide d’acide oxalique. Ce dernier sera appliqué sous forme liquide par dégouttement si les abeilles sont déjà en grappe ou sous forme gazeuse par sublimation si les températures sont positives et que la grappe d’abeilles n’est pas encore formée, et si possible en absence de couvain, mais il vaut mieux le faire quand il y a encore un peu de couvain que d’attendre ‘le bon moment » et finalement de pas le faire car les températures descendant et l’hiver arrivant, on se retrouve piégé avec un traitement non administré. N’oublions jamais que le mieux est l’ennemi du bien.

Ceci étant dit, revenons à nos travaux au rucher, et surtout au traitement des cadres de hausses extraits. Comme je le dis souvent, je ne conserve que les cadres ne contenant aucun pollen, afin d’éviter toute infestation de fausse teigne. Le traitement appliqué: aucun puisque dès l’extraction terminée, je trie les cadres et je range ceux à conserver directement dans les congélateurs prévus à cet effet, sans autre forme de procès. J’utilise les anciens congélateurs ne fonctionnant plus comme armoires étanches. Je ne fais jamais lécher les cadres et m’en trouve bien depuis bientôt 40 ans. Pourquoi pas de léchage? Je ne vois pas pourquoi je devrais faire un travail inutile, risqué, déclenchant un pillage probable au sein du rucher alors que les cadres non léchés se conservent mieux que léchés. Comme le dit souvent Robert Grégoire, l’apiculteur qui m’a initié à la culture des abeilles:  » Ne provoque pas la besogne, il y en a déjà assez ainsi « . Et c’est vrai que faire lécher les cadres est une opération contraignante et risquée dont je me passe bien volontiers. Certains me diront qu’au printemps, lors du placement des cadres hivernés dans les hausses, cela « sent un peu l’hydromel« . Je leurs répondrai que cet inconvénient mineur est compensé par le fait que cette odeur attire les abeilles dans la hausse que l’on vient de mettre en place, et que une fois occupée et nettoyée, les abeilles y restent et commencent de suite à travailler. Voilà la réponse que je donne à ceux qui se plaignent souvent que leurs abeilles rechignent à « monter dans la hausse » au début de la miellée. Quant aux cadres contenant du pollen,  je les fonds le plus rapidement possible au cérificateur à vapeur, afin d’éviter toute contamination par la fausse teigne. Ils sont, dans la foulée, lavés dans un bain de soude en cristaux, mis séchés bien à plats, en quinconce, les uns sur les autres, puis rangés au grenier dans l’attente d’être équipés d’une feuille de cire gaufrée et de repartir dans le cycle de la vie de la ruche. N’oublions pas que la construction des cadres est un besoin physiologique des abeilles cirières qui demandent à construire. De plus, le prix de la cire s’envole d’année en année pour atteindre les 30 euros le kilo. Le commerce de la cire est plus que jamais lucratif, il faut le savoir. Le remplacement des cadres intervient aussi grandement dans la bonne santé de la colonie et évite certainement l’apparition de toutes sortes de maladies. Evidemment, tout cela engendre du travail pour l’apiculteur, mais c’est cela aussi être le bon berger de ses abeilles.

Courant septembre, le second bidon de sirop de sucre sera donné aux peuples qui, pour rappel, en ont déjà reçu un premier dans la foulée du retrait des hausses de miel fin juillet. Les colonies auront donc finalement reçu 15 kilos de sucre sec sous forme de 20 litres de sirop 6/10. Cela devrait suffire à leur faire passer la période froide de l’année et relancer le démarrage printanier.

Pour le reste, une fois tous ces travaux effectués, c’est de calme qu’auront surtout besoin nos colonies. Avec l’apparition du frelon asiatique dans nos régions, ce calme risque fort d’être tout prochainement perturbé. En effet, c’est fin aout et courant septembre que l’apogée des nids de frelons asiatiques est rencontrée avec l’élevage des reines et mâles qui vont engendrer la descendance de l’espèce. C’est donc maintenant que les attaques de ruches seront les plus virulentes et que le piégeage des fondatrices ainsi que la destruction des nids trouvés doivent se faire de façon stricte. Pour rappel, un nid de frelons asiatiques peut engendrer plusieurs fondatrices qui seront d’attaque en 2020. A l’instar de la lutte contre le varroa, nous nous devons de lutter contre ce nouveau fléau qu’est le frelon asiatique. En cas de découverte d’un nid, prenez contact avec Monsieur De Proft  du CRAw au n°: 0476/ 760532.

Michel Smet

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