« Au rucher » 2018-07

Par Michel Smet

Une fois la récolte du miel de printemps terminée, l’apiculteur va récupérer un peu de temps et pouvoir s’adonner à cette passion sans cesse renouvelée qu’est l’élevage des reines. Pour rappel, c’est la reine qui fait la colonie! Donc, si la reine est de mauvaise qualité, il en ira de même des abeilles produites par elle. Par belle ou par laide, il nous faut donc autant que faire se peut avoir des reines de grande qualité dans nos peuples si on veut faire une récolte de qualité et digne de ce nom. Cà, c’est le premier point. Le second point, c’est le voisinage, qui a de grandes difficultés à admettre que les abeilles possèdent un dard et peuvent…..piquer. Il nous faut donc posséder des reines prolifiques mais également qui produisent des abeilles douces, et si possible peu ou pas essaimeuses, problème qui embête plus l’apiculteur que le voisin, mais dont il faut tenir compte. Tous ces critères passent obligatoirement pas un élevage de reines bien mené.

Finalement, quoi qu’on dise ou pense, faire un élevage de reines n’est pas très compliqué et ne requiert pas de matériel couteux comme certains le laissent sous-entendre. Bien sûr, il faut posséder une reine génitrice qui possède toutes les qualités requises afin que les filles produites aient les mêmes qualités. On peut aussi se procurer les larves adéquates pour réaliser l’élevage auprès d’un ami apiculteur qui possède une reine exceptionnelle. Passons à présent à l’élevage des reines proprement dit. Il existe bien sûr autant de façon de faire qu’il n’y a d’apiculteurs. Voici une méthode simple qui a fait ses preuves et qui ne nécessite que peu de matériel. Dans une ruchette 5 cadres, nous plaçons deux partitions afin de réduire le volume et faire en sorte que les abeilles soient à l’étroit. Hors de 3 colonies de production, nous prélevons 1 cadre de couvain operculé et ses abeilles afin de remplir la ruchette. Hors d’autres ruches de production, nous brossons les abeilles issues de quelques cadres de hausses afin de « bourrer » la ruchette de viande jeune. Nous plaçons le couvre-cadres sur la ruchette et la mettons à l’écart des ruches de production ayant fourni les abeilles trou de vol ouvert. Deux heures plus tard, notre ruchette éleveuse est prête à recevoir le cadre possédant les cellules royales artificielles greffées sur une reine d’élite; ce cadre viendra remplacer une des deux partitions dans la ruchette éleveuse. Cette opération de prélèvement de larves âgées de moins de 36 heures s’appelle « picking » et se réalise avec une cuillère appropriée elle aussi appelée picking. Une fois placées dans la ruchette éleveuse, les cellules royales (CR) seront prises en charge par les abeilles orphelines qui ne pensent plus qu’à une chose: retrouver une reine au plus vite! Plus il y aura de jeunes abeilles nourrices dans la ruchette éleveuse et plus les CR seront bien alimentées en gelée royale et donneront des reines de qualité.

Onze jours plus tard, les CR seront placées dans les nucléi de fécondation par exemple de type Apidea afin de naitre et y réaliser leur vol de fécondation. Ces Apidea sont peuplées la veille de la naissance des reines de notre élevage avec des abeilles issues de la ruchette éleveuse puis, placées en cave trou de vol fermé. On donne à ces petites unités du candi dans le bac nourrisseur prévu à cet effet avant de les peupler. Le lendemain, sans devoir ouvrir ces nuclei de fécondation car un orifice est prévu dans le couvre cadre en plexi, les CR sont retirées de la ruchette éleveuse et introduites dans les Apidea. Trois jours plus tard, alors que les jeunes reines sont nées respectivement dans leur unité, on place, en début de nuit, les Apidea en extérieur, sur un support comme un casier PVC par exemple, et on ouvre les trous de vols afin de donner accès à l’extérieur aux abeilles qui pourront, dès le lendemain, faire leur vol d’orientation. Les jeunes reines vierges feront de même et effectueront leur vol de fécondation quelques jours plus tard. Dans la ruchette éleveuse, on laisse une CR de l’élevage naitre ( si il reste assez d’abeilles après avoir peuplé les APIDEA) et , après avoir effectué son vol de fécondation, prendre possession de la ruchette et devenir, pourquoi pas, une nouvelle colonie de production.

Côté Apidea, une fois fécondées, les reines commenceront à pondre, et trois semaines plus tard, pourront être introduites dans les ruches de production réclamant une nouvelle reine. Vous voyez que finalement, rien n’est très compliqué d’élever quelques reines pour son usage personnel, et quel défit sur soi même d’y arriver.

Pour le reste, une fois la récolte d’été extraite des ruches, nous devrons nous concentrer sur le nourrissement hivernal des peuples ainsi que la lutte contre la varroase. Question nourrissement, je réalise mon sirop sur base de sucre cristallisé dissout dans de l’eau froide. La recette se trouve dans la revue. Je distribue un premier bidon de 10 litres entre fin juillet et mi aout, afin de relancer la ponte des reines. Le second bidon sera donné à la mi septembre. J’aurai alors donné l’équivalent de 15 kg de sucre sec par colonie, et il faut bien çà, si les jachères fleuries ne viennent pas contrecarrer mes plans bien sûr. Pour rappel, ces apports nectarifères de fin d’année sont très nocifs pour nos abeilles grasses d’hiver qui sont, malgré elles, transformées en butineuses dont la vie est de ce fait nettement raccourcie. Et je ne vous parle pas de la qualité des nectars et pollens, ramenés à la ruche. Rien de bien fameux puisque ces jachères fleuries suivent des cultures traitées. Bref, que des ennuis pour nous apiculteurs que ces jachères fleuries de fin d’année. On s’en passerait bien!

A la mi-décembre, un check-up sera réalisé afin de savoir si le traitement de longue haleine contre varroa a été efficace ou plus ou moins efficace. Nous reparlerons de tout çà prochainement.

Michel Smet

A relire: « Au rucher » juillet-août en 2017.

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