« Au rucher » 2016-01

Par Michel Smet

En ce début d’année, le calme le plus plat est de rigueur au rucher. En effet, nos avettes sont bien regroupées sur les cadres de nourriture et il faut, autant que faire se peut, respecter cet ordre. Autant que faire se peut, oui et non car le moment de réaliser le traitement anti-varroa avec l’acide oxalique est venu. Pour rappel, une colonie d’abeilles possède en son sein un certain nombre de varroas, voire un nombre certain, si le traitement de fond réalisé fin juillet n’a pas été fait correctement, voire pas du tout (pour certain(e)s). Alors, sachez que ce n’est pas début janvier que vous parviendrez à sauver quoi que se soit, c’est trop tard! Les abeilles présentes dans les peuples ont été malmenées dès leur conception en septembre et ne pourront jamais se relever de cet état de « mauvaise santé ».

Hiver clément

Encore un hiver trop clément

Il est indispensable de liquider le maximum de varroas le plus rapidement possible dès le retrait des hausses de miel vers le 15 juillet et ce, en traitant les peuples avec une méthode qui fonctionne d’une manière certaine. La génération d’abeilles produites en août et qui sont saines, pourront alors elles-mêmes produire la génération d’abeilles qui passeront l’hiver. Ces dernières seront saines, grasses et non « piquées » par ce vampire qu’est varroa. C’est primordial si l’on veut assurer la survie de la colonie et espérer retrouver les abeilles au printemps.

Le traitement de janvier à l’aide d’acide oxalique sera donc la suite logique de celui d’août et servira à « liquider » les derniers varroas encore présents et qui sont souvent issus de la dérive des abeilles qui ramènent des varroas phorétiques (phorétique: relatif à la phorésie, comportement de certains animaux se faisant transporter par d’autres) dans les ruches.

D’après José Artus, apiculteur professionnel en province luxembourgeoise, cette ré-infestation peut aller jusque 50 varroas par semaines, sur les derniers mois de l’année. C’est énorme car sur la période automnale, on peut alors retrouver plusieurs centaines de varroas dans les ruches qui avaient pourtant été correctement traitées en août. C’est donc là que se trouve tout l’intérêt du traitement d’hiver réalisé à l’aide de l’acide oxalique: démarrer la saison avec un minimum d’acariens dans les peuples.

Comment procéder? Là aussi, plusieurs écoles. Le traitement par dégouttement versé sur les abeilles directement fonctionne bien mais semble causer la mort des dernières abeilles ayant été engendrées par le peuple. La cause: la paroi chitineuse de ces abeilles encore jeunes n’est pas assez dure pour « encaisser » ce sirop acide que nous versons sur les abeilles. Certains traiteront donc leurs peuples par sublimation d’un gramme d’acide oxalique di hydrate à l’aide d’un appareil approprié. Pour ma part, et ayant utilisé les deux méthodes, je trouve que les abeilles sont bien plus stressées avec le système par sublimation par rapport au dégouttement. Perdre quelques abeilles me semble être moins grave que « traumatiser » l’ensemble de la colonie par les gaz sublimés. Et je ne parle pas des mesures de précaution que l’apiculteur doit absolument prendre pour réaliser le traitement par sublimation: gants, masque anti-gaz, lunettes etc.

Faut-il traiter toutes les colonies? Non! Il faut d’abord contrôler le nombre de varroas présents sur les abeilles. Comment faire, me direz-vous en cette période froide de l’année? Tout simplement en plaçant une feuille de papier blanc sur le tiroir de fond de ruche 15 jours avant la date prévue pour le traitement. Si 15 jours après avoir placé le papier, on trouve 3 ou 4 varroas, on peut ne pas réaliser le traitement. En effet, le nombre de varroas présents est certainement faible. Par contre, si sur une durée de 15 jours, on trouve une ou plusieurs dizaines d’acariens, il faut alors traiter le plus rapidement possible, sachant qu’une ré-infestation importante par des varroas phorétiques s’est faite lors des derniers mois passés. La survie de la colonie est en jeu. Il est donc important de faire la part des choses et ne pas traiter d’office tous les peuples car ce traitement à l’acide oxalique perturbe les abeilles. Il sera donc fait uniquement dans les colonies le nécessitant. Le produit Beevital peut aussi être utilisé à bon escient.

En résumé, nous devons toujours avoir le varroa à l’œil afin de ne jamais lui laisser la possibilité de se développer et de prendre le dessus. Tous les coups sont permis pour lutter contre ce fléau.

Pour le reste, l’hiver sera mis à profit pour finaliser le nettoyage des cadres et de tout le matériel en général. Le placement des feuilles de cire gaufrées dans les cadres sera également réalisé dans les règles de l’art. Ne tendez pas trop fort les fils d’inox qui finiraient par engendrer la déformation des lattes en bois et rendraient le cadre inutilisable. Un fil légèrement détendu sera retendu avec la roulette zig-zag. Les feuilles de cire seront alors soudées en faisant passer du courant dans les fils grâce à un transformateur approprié. En un mot comme en cent, tout sera apprêté pour la visite de printemps qui sera vite à nos portes.

A la mi-janvier, nous contrôlerons la quantité de nourriture encore présente dans les peuples par le soulèvement de la partie arrière de la ruche. En cas de doute, nous appliquerons un paquet de candi sur le trou de nourrissement afin de pourvoir à un éventuel manque de nourriture. Nous penserons à bien replacer l’isolation sous la toiture en couvrant le candi car comme la ponte est en passe de reprendre au sein de la grappe, le maintien de la température dans la ruche est primordial en ce moment de l’année.

Début février, les premiers pollens de saule, crocus et noisetier feront leur apparition et engendreront inévitablement la reprise de ponte de la reine si cela n’est déjà fait. Le cycle de la vie de la ruche reprendra alors son cours, mais tout cela est une autre histoire dont nous reparlerons plus tard. .

Michel Smet

A relire: « Au rucher » janvier-février en 2015.

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