« Au rucher » 2014-09

Par Michel Smet

En cette fin d’été, nous allons devoir nous soucier de travailler le miel récolté afin de lui donner la texture adéquate qui plaira à la clientèle: un miel souple, fin et crémeux. Voilà ce qu’exigent les clients aujourd’hui. Et comme le client est roi, nous devons nous plier à ses exigences, nous n’avons pas le choix. Comment donc arriver à ce résultat me direz-vous? Il y a à mon sens, une seule façon de faire. Cette méthode a été mise au point par feu mon ami Paul Petit, qui au cours de sa longue carrière d’apiculteur était parvenu à trouver « l’astuce » pour atteindre le résultat escompté. Certes, il m’a fallu le travailler « au corps » pour qu’il me livre son secret, mais se voyant avancer en âge, il a jugé bon de transmettre son savoir-faire. Et ce savoir-faire, je vais vous le faire savoir, comme il le disait si bien.

Octobre

Octobre

Tout d’abord, nous devons être convaincus de la chose suivante: malaxer un miel liquide afin de la faire prendre ne sert à rien! C’est exactement comme si vous mélangiez de l’eau. Ceci étant dit et accepté, nous attendrons le changement de couleur du miel dans le maturateur avant d’y plonger le malaxeur. Ce malaxeur ne sera en aucun cas un « jouet de Saint-Nicolas »! Vous devez investir dans un malaxeur type à plâtre, avec un moteur costaud car le malaxage du miel requiert beaucoup d’énergie. Faites l’investissement une bonne fois pour toutes et vous serez tranquille pour votre carrière d’apiculteur.

Ce changement de couleur du miel vous indique le début de la formation des cristaux que nous allons concasser en fines particules afin de donner au miel sont aspect « fin ». On peut aussi ensemencer le miel d’été avec 10 % de miel de printemps ayant déjà cette texture fine et qui la transmettra au miel d’été. Cette opération peut être réalisée dans des maturateurs de grande quantité comme 100 kilos et plus.

Quand le miel aura atteint la consistance d’une pate onctueuse, résultat que vous obtiendrez au fil des malaxages successifs, et qu’il sera « bon à être mis en pots », c’est à ce moment que nous allons le transvaser dans des maturateurs de 40 kilos afin de pouvoir être traité par la suite comme il se doit. Si à ce moment vous le mettez en pots, vous aurez certes un miel fin mais qui va durcir comme du béton. C’est là que vont se succéder les remarques désobligeantes de vos clients: ton miel est dur comme du béton et on ne sait pas le tartiner sans déchirer complètement le pain! C’est ici qu’intervient Paul Petit avec sa méthode. Le miel fin ayant été conditionné dans des maturateurs de 40 ou 50 kilos est à présent placé dans une armoire chauffante thermosatisée à une température de 35 degrés pendant 24 heures afin de le ramollir et le rendre à nouveau malaxable. Une fois dans cet état, nous malaxons le miel à nouveau pendant 5 à 10 minutes et c’est par cette opération que, une fois mis en pots, le miel sera à la fois fin et tartinable, tout ce que demande le client.

Attention, une erreur à ce stade ne doit surtout pas être commise: mettre le miel en pots dès que malaxé. S’en suivra une remontée des bulles d’air en surface des pots qui va gâcher complètement la marchandise en laissant croire qu’une fermentation est en cours. Afin d’éviter ce problème, vous replacerez votre maturateur dans l’armoire chauffante pendant 24 heures à une température de 25 degrés. Les bulles d’air vont remonter en surface du miel qui sera mis en pots sans plus être malaxé évidemment! C’est la seule façon d’obtenir un pot de miel fin, onctueux et d’aspect irréprochable pour l’œil averti du consommateur. Telle est la recette de feu oncle Paul, recette qu’il avait mise au point par la réflexion qui était la sienne et que comprendront ceux qui l’on bien connu.

De plus, depuis les normes de l’AFSCA qui sont en vigueur, tout miel mis en pot doit être nanti de son étiquette mentionnant sa date de péremption qui correspond à la date de mise en pot, jour pour jour, plus deux ans. En cas de contrôle, si des pots non étiquetés sont découverts, c’est l’amende à coup sûr. Tant que le miel se trouve en maturateur, il n’est pas conditionné. Qui dit pas conditionné dit pas de date de péremption. Inutile de vous faire un dessin, vous avez compris!
De plus, le miel conservé en maturateur se garde mieux que conditionné en petits récipients. Je réchauffe et travaille donc ma récolte au fil du temps, maturateur après maturateur ce qui me permet de toujours avoir un miel de première qualité.

C’est donc de cette façon que je procède depuis de nombreuses années maintenant afin d’offrir à mes clients un miel présentable, onctueux, fin et surtout, tartinable, critère indispensable pour faire apprécier aux gens ce merveilleux produit qu’est le miel que nous récoltons tous.

Michel Smet

A relire: « Au rucher » septembre-octobre en 2013.

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