Actualité (presque) apicole 2013-01

Par Benoît Manet

On se souvient encore de la date du 21 décembre dernier; date fatidique pointée par d’aucuns comme la fin du monde selon le calendrier Maya. Je me pince et constate que je suis toujours là. Ouf, j’en profite pour vous présenter des voeux de petites et grandes joies au quotidien. En fait de fin du monde, je vous souhaite plutôt que ce soit la fin d’un monde avec le sursaut nécessaire pour que jaillisse quelque chose de différent qui nous fasse rencontrer des moments simples mais des moments heureux. Peut-être par des moments de simplicité volontaire comme le propose Pierre Rabhi, agroécologiste et écrivain, pour accorder la priorité à des valeurs essentielles avant de succomber au consumérisme, source des malaises de notre société, ayant engendré les différentes crises actuelles (économiques, financières, sociales, agricoles, environnementales, …. ).

Dans son dernier ouvrage « La guérison du monde », Frédéric Lenoir, philosophe et écrivain, nous parle de ce monde en mutation, nous invitant à agir à l’échelle citoyenne, chacun à notre niveau, et localement, pour sortir du toujours plus pour le mieux-être suivant l’adage de Gandhi qui nous invitait par un « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde ». Le début d’année n’est-il pas aussi le moment des bonnes résolutions ? Une belle réflexion sur nos valeurs communes pour un monde durable. Durable, faut-il qu’il le soit alors que l’actualité nous met plutôt le « bourdon » ! Mais cela progresse…

Bourdon sur trèfle

Bourdon sur trèfle
By bube09 / Foter / CC BY-NC-SA

Il est superflu de vous convaincre du rôle important des abeilles en tant qu’agent pollinisateur des plantes à fleurs, qu’elles soient cultivées ou sauvages. Et pourtant pas un mois ne passe sans qu’on ne parle de pertes de colonies. De gros efforts de recherche sont entamés pour expliquer ces phénomènes. L’impact des pesticides est un des facteurs qui est le plus suivi pour le moment car suspecté d’être une cause, directe ou indirecte, unique ou combinée, des phénomènes constatés. Au point que ce sont plus de 100 articles et rapports qui ont été publiés tout au long de cette année sur le sujet. Un article de Gill et al. paru dans la bien célèbre revue scientifique Nature en novembre dernier fournit des éléments intéressants quant à la réponse de bourdons exposés à 2 insecticides en analysant les effets sur le développement des colonies et l’activité de butinage. Les conclusions rejoignent celles d’études précédentes, à savoir que le couvain est moins abondant dans les colonies soumises à l’exposition insecticide mais rapportent également une activité de butinage accrue due à un nombre de butineuses ne revenant pas à la colonie.

Les résultats de cet article méritent toutefois d’être commentés pour différentes raisons :

  1. l’utilisation du bourdon dans ces essais apporte d’autres avantages car, contrairement aux abeilles, ceux-ci, de par leur biologie et leur écologie différentes, sont plus vulnérables aux pesticides. La taille des colonies est davantage affectée par la perte de butineuses puisque les colonies se limitent à quelques dizaines d’ouvrières ;
  2. l’effet sublétal des apports de nourriture contaminée ramenés et consommés ultérieurement affecte davantage les petites colonies. Les effets peuvent être mieux mesurés tant au plan de l’individu que de celui de la colonie en apportant des éléments à la compréhension des intoxications chroniques.
Pulvérisations

Pulvérisations
By tpmartins / Foter / CC BY-NC-SA

Mais le débat reste compliqué tant l’impact d’autres facteurs tels que la combinaison d’effets avec les parasites et les ressources de butinage est grand. Néanmoins, cet article apporte des éléments de réponse intéressants pour faire progresser les méthodes d’évaluation des pesticides jusqu’ici utilisées, en passant au besoin par des modélisations construites sur des bases solides.

Alors ma résolution pour cette année ? Rester cohérent par une approche globale, présentée comme holistique. Et de ce fait, prôner la réduction ou l’interdiction de ces biocides trop dénoncés dans la survie de l’abeille. Il en va du choix des moyens de lutte contre varroa. Il en va également de stratégies de lutte contre le frelon asiatique dont nous pouvons nous attendre à le voir franchir nos frontières à moyen terme. J’étais effrayé de lire dans le dernier numéro de la revue de l’URRW une technique d’élimination du frelon par appât carné imbibé au fipronil et placé à proximité du rucher. Je pense que si nous utilisons les mêmes armes que celles que nous décrions par ailleurs, et cela sans évaluation pertinente, notre crédibilité s’effondre assurément. L’alternative est à chercher ailleurs que dans ces produits qui tuent nos abeilles.

Je suis convaincu que l’apiculture dans son sens le plus noble fait partie intégrante de ces valeurs estimables évoquées en début de chronique. Je vous souhaite beaucoup de plaisir au contact de vos mayas-abeilles. Bonne année apicole 2013 !

A suivre …

B. Manet

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