« Au rucher » 2018-05

Par Michel Smet

Les colonies qui sont à présent bien développées ont toutes les chances de produire une belle récolte de miel de printemps. Les deux semaines de fortes chaleurs ont fait « exploser » toute la végétation en une fois, ce qui n’arrange pas les affaires des apiculteurs. En effet, au lieu de floraisons successives et étalées dans le temps, nous sommes face à la floraison de toutes les plantes mellifères en même temps. Le creux de miellée sera donc, on mon avis, assez conséquent cette année sauf si les tilleuls et autres ronces fleurissent dans la foulée. Mais alors, il ne restera plus rien, pour ainsi dire, pour la miellée d’été qui risque bien fort de tourner court. L’avenir nous le dira mais…..

Dans les colonies, ces apports massifs de nectar et pollen ont boosté la ponte des reines et les colonies sont relativement fortes à présent. Attention à la fièvre d’essaimage qui guette les plus forts peuples.

Le placement des hausses sera réalisé dès que les colonies seront aptes à les recevoir, c’est-à-dire dès que le cadre témoin sera bâti après avoir été recoupé en début de saison. C’est le signe indiqué par le baromètre de la ruche qu’est le cadre témoin. Il nous relate tout ce qui se passe dans le peuple sans devoir systématiquement ouvrir et retourner la colonie de fond en comble. Il ne sert à rien de hausser une colonie qui n’occupe pas son cadre témoin, car elle ne possède pas assez d’abeilles que pour pouvoir l’occuper. Dans ce cas, il nous faudra voir pourquoi il en est ainsi, et y remédier. La reine est-elle trop âgée? N’est-elle pas bloquée dans sa ponte par un excès de nourriture périphérique? Lui a-t-on donné la possibilité d’étendre sa ponte en griffant la nourriture se trouvant en bordure du couvain? La reine est-elle encore valable? Tout sera fait pour remédier au problème afin de procéder au plus vite au placement de la hausse à miel. Comme déjà dit, les miellées ne durent finalement que quelques jours sur la saison et il ne faut pas louper le coche.

Comment placer les hausses? Tout d’abord, c’est une grille à reine de bonne qualité qu’il nous faut placer en premier lieu afin d’empêcher cette dernière d’étendre sa ponte dans les greniers à miel. Cela ne pose que des problèmes lors de l’extraction du miel. Vient ensuite la première hausse qui sera équipée comme suit: trois cadres bâtis placés à gauche et trois placés à droite, puis, au centre, un cadre de cire alterné avec un cadre bâti pour compléter le tout. En effet, en début de miellée, les colonies ne possèdent pas encore beaucoup de cirières. Les cadres bâtis leur permettent d’étendre les premiers nectars directement afin de les assécher et les transformer en miel. Pendant ce temps, les premières cirières arrivent dans les hausses et étendent les cires gaufrées en cadres bâtis, cadres qui permettent le stockage de la récolte. Je place les premiers cadres bâtis sur les côtés car nous savons tous que les abeilles travaillent « en grappe » et délaissent volontiers les rives pour se concentrer sur le milieu du volume. Une fois bien occupée par les abeilles, cette première hausse sera accompagnée d’une seconde hausse nantie cette fois de moitié cadres bâtis et moitié cires gaufrées vu que les cirières sont de plus en plus nombreuses. Pour rappel, toute ouvrière passe par le stade de cirière qui a besoin de sécréter de la cire, c’est un besoin physiologique qui doit être assouvi par les cirières. N’hésitez donc pas à donner des cadres à bâtir à vos colonies, elles vous le rendront au centuple!

Cette seconde hausse sera placée sous la première afin d’éviter aux abeilles de devoir traverser la hausse pleine pour se rendre dans la vide. C’est une chose qu’elles n’aiment pas faire et préféreront alors « bourrer » le corps de ruche de nectar, ce qui provoquera le blocage de la ponte de la reine et fera partir la colonie en essaimage.

Les troisième, quatrième voire cinquième hausses seront toutes placées suivant cette logique d’esprit: la hausse vide sous la(les) pleines; c’est une question de bon sens!

Dès la floraison du colza terminée, les hausses pleines de miel seront retirées des peuples sans tarder; en effet, le miel de colza a la particularité de cristalliser rapidement, voire trop rapidement! Ce phénomène peut poser de gros problèmes si on laisse trop la récolte dans la ruche: on ne parvient plus à essorer les cadres qui sont remplis de miel « béton ». Si un tel cas se pose à vous, il faudra réchauffer les cadres afin de liquéfier le miel et pouvoir l’extraire, mais, cette solution ne doit pas être envisagée chez un apiculteur sérieux, cela va sans dire.

Avant de procéder à l’extraction, contrôler le taux d’humidité du miel operculé qui peut, malgré qu’il soit operculé, contenir plus de 18% d’eau et finalement, mal se conserver. Le fait que le miel soit operculé ne veut pas toujours dire miel mûr! Si le taux d’humidité est trop élevé, placez les hausses à extraire dans un local chauffé à 30 ° C et déshumidifié en continu pendant quelques heures, voir quelques jours. Ce travail sera largement récompensé par un miel de qualité se conservant longtemps. Tout a un coût !

Pour le retrait des hausses de miel, il va falloir repousser les abeilles vers le bas, dans le corps de ruche à l’aide du plateau chasse-abeilles, mais aussi dans une ou plusieurs hausses contenant des cadres vides suivant la force du peuple. Il serait en effet stupide de vouloir repousser les abeilles contenues dans 4 ou 5 hausses dans le corps de ruche seul. Cela conduirait d’office la colonie à l’essaimage. Si vous travaillez avec des ruches divisibles, attention de bien veiller à laisser du miel à disposition dans la hausse conservée sur le corps. En effet, chaque année, des peuples meurent de faim en pleine saison par manque de vigilance de l’apiculteur qui « ramasse » tout lors de l’extraction sans rien laisser à ses abeilles pour rejoindre la miellée d’été. Ce problème se marque moins dans les ruches à grands cadres de corps type Dadant, où les abeilles stockent toujours du miel dans les coins supérieurs des cadres. Soyez vigilants donc et pensez à ce phénomène.

Pour le reste, ce seront les visites hebdomadaires qui seront effectuées, avec bien sûr, la chasse aux cellules royales, le placement des hausses à miel, la réalisation d’essaims sur cadres par le retrait des cadres de couvain excédentaires, le placement de cadres de cire gaufrée afin de procéder au renouvellement du nid à couvain, etc….
Mai et juin sont aussi les deux mois de prédilection pour élever des reines de qualité, mais nous parlerons de tout cela prochainement. Bonne récolte de printemps et à bientôt.

Michel Smet

A relire: « Au rucher » mai-juin en 2017.

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