« Au rucher » 2016-05

Par Michel Smet

Mais que se passe-t-il? Voilà qu’il neige fin avril!

Le monde à l’envers qui n’arrange pas les apiculteurs que nous sommes! En effet, les colonies sont prêtes pour réaliser la récolte de miel de printemps, les fruitiers sont tous fleuris et c’est pareil pour le colza, qui ravive la couleur des champs par son jaune éclatant. Certes, toutes les conditions sont remplies pour casser la baraque, sauf une: la chaleur! Et oui, chers amis, c’est cela l’apiculture, une sorte de loterie à laquelle il est toujours difficile de gagner….et avec laquelle il nous faut vivre.

Mai

Mai (une année où le temps n’est pas déréglé)

Début avril, les colonies les plus fortes possèdent déjà entre 4 et 7 cadres de couvain operculé. Or, 1 cadre de couvain operculé fournit les abeilles pour couvrir 2,5 cadres du même format. Vous aurez vite compris que, beau temps ou pas, l’agrandissement du volume de la ruche doit être effectué, et ce sans trainer, sous peine de courir après les essaims dans les semaines qui vont suivre. Gouverner, c’est prévoir! Et en apiculture, il faut toujours devancer les besoins des abeilles, c’est bien connu! Comment allons-nous donc procéder afin d’éviter les écueils? Tout d’abord, prévoir du travail pour toutes les abeilles: des cadres à bâtir pour les cirières, des cadres bâtis pour que l’on puisse étendre le nectar composé de 85% d’eau et qui sera asséché à 17% afin de devenir du miel.

Dans les corps de ruches, donnez à la reine la place qu’il lui faut pour étendre sa ponte et renforcer la colonie en futures butineuses, car seules beaucoup d’abeilles sont capables de récolter beaucoup de miel en peu de temps. Et c’est bien là qu’est la finesse de l’apiculture: faire en sorte d’avoir un gros bataillon de butineuses au moment des grandes floraisons. C’est le seul secret de la réussite en apiculture, sachez-le.

Dans les greniers à miel, ne surtout pas attendre que la première hausse soit pleine pour placer la seconde, il sera trop tard! Toujours devancer les besoins des abeilles, et cela, même si les conditions climatiques sont mauvaises. Il est vrai qu’il n’est pas agréable de devoir travailler dans les peuples quand le temps est froid, mais il faut s’y plier, afin de ne pas laisser les abeilles dans une situation d’inconfort qui aboutirait à un essaimage et à la perte de tout le travail fait jusque là.

Pour le placement des hausses supplémentaires, comme déjà dit, toujours placer la nouvelle hausse sous les hausses en place afin d’éviter aux abeilles de devoir traverser les magasins pleins pour atteindre la hausse vide. En effet, elles n’y pousseront du nectar qu’après avoir « bourré » le corps à couvain et ainsi bloqué la reine dans sa ponte. S’en suivra un départ de fièvre d’essaimage qui sera toujours difficile de contrer et finalement, la sortie d’un essaim.

Dès la fin de la floraison du colza, les hausses seront retirées des ruches sans attendre: en effet, le miel de colza se fige en quelques jours et ce serait la catastrophe s’il venait à cristalliser dans les cadres. Vous n’attendrez donc pas l’operculation des cadres mais vous vous fierez plutôt à la fin de la floraison. Pour procéder à l’enlèvement des hausses au printemps, toujours repousser les abeilles des hausses à extraire dans une (ou plusieurs) hausses vides, et ce afin de ne pas provoquer un surpeuplement, même temporaire, dans les corps de ponte. Cela provoquerait la fièvre d’essaimage dans les heures qui suivent le retrait des hausses de miel. In fine, vous devez toujours travailler avec la nature, et d’une manière logique et qui va dans le bon sens. Vous parviendrez alors à pratiquer une apiculture saine et agréable pour vous et vos voisins.

Mai et juin sont également les deux mois de prédilection pour pratiquer le plus bel aspect de l’apiculture qu’est pour moi, l’élevage des reines. Ces deux mois d’abondance en abeilles et en fleurs nous donneront l’occasion de peupler les ruchettes de fécondation des jeunes reines que nous aurons élevées dans les meilleures conditions possibles. Là aussi, compréhension, logique, bon sens et habileté seront les maîtres mots de la réussite qui nous donneront finalement des reines de qualité que nous pourront introduire dans les ruches de production en fin de saison. Le surplus (si surplus il y a) sera hiverné dans des ruchettes afin de disposer de reines au printemps suivant.

Si, malgré vos bons soins, un essaim devait quitter sa ruche, et que vous ayez la possibilité de le récupérer, votre premier tracas sera de le traiter contre la varroase. En effet, ne possédant pas encore de couvain, ce paquet d’abeilles sera vite débarrassé des varroas phorétiques (présents sur les abeilles) grâce à une application d’acide oxalique, soit par fumigation, soit par dégouttement dans du sirop. Il serait vraiment idiot de rater cette occasion de bien faire les choses. Là aussi, logique, logique, logique…..

Cet essaim sera également toujours nourri avec du sirop lourd qui lui permettra de constituer de suite un volant de nourriture indispensable à son développement. Donnez-lui des cadres à bâtir afin qu’il démarre sa nouvelle vie dans les meilleures conditions. Un essaim demande toujours à bâtir, là aussi c’est la nature.

Pour finir, je vous dirai que l’année apicole ne dure que trois mois, mois pendant lesquels nous aurons beaucoup de travail, ainsi que nos chéries, mais mois fantastiques et fabuleux pour les amis des abeilles que nous sommes. A bientôt.

Michel Smet

A relire: « Au rucher » mai-juin en 2015.

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